2016年3月7日 星期一

超譯阿岡本之一:〈電影史上最美的六分鐘〉



        桑丘.潘沙走進一間鄉下小鎮的電影院。他尋找著唐吉軻德,發現其獨自一人坐在影廳一頭,眼睛直盯著大銀幕。廳內近乎滿座,上方酷似一個巨大包廂的樓廳則擠滿喧鬧的孩子。桑丘多次試著接近唐吉軻德。無法。不得已他只好在影廳內先坐下來,旁邊坐著一個請他吃棒棒糖(是杜希內亞?)的小女孩。電影已經開始:是一齣古裝劇,在銀幕上我們可以看到帶著武器的騎士奔來赴去。突然間,一位女子出現了,她身處絕境。唐吉軻德唰地一聲站直起來,拔劍出鞘後便衝向銀幕開始劃破布幕。此時,我們仍然看得到銀幕上的女子與騎士,但那被唐吉軻德的劍所割開的漆黑裂隙卻依然不斷擴大並終以無可挽回之勢吞噬了影像。最後,銀幕上再也沒有任何東西:我們只看得到背後支撐的木造結構。觀眾們紛紛憤而離席,但樓廳上的孩子們依然興奮地鼓譟著唐吉軻德。唯一只有影廳裡的那個小女孩以斥責似的眼神瞪著他。


        究竟該拿我們的幻想怎麼辦呢?愛它、信它直到毀滅並扭曲它的地步(這或許就是歐森. 威爾斯電影的意義)。但終究也只有在幻想揭示自身的空乏與不滿,只有在其向我們顯露出那構其所成的虛無之時,我們才可能償清認識真相得付出的代價,並理解到多希內亞—那個我們所拯救的多希內亞—不可能愛我們。



註:原文收錄於Martin Rueff的譯本:Giorgio Agamben, Profanations, Payot & Rivages, 2005。因為還不懂義大利文(卻有強烈的翻譯阿岡本的慾望),只得從法文來下手,是為超譯。

«À quoi sert la publicité?»: Une petite réflexion d’après Debord et Benjamin

Antonioni, Zabriskie Point (1970)


           À quoi sert la publicité? C’est une question difficile à répondre dans la mesure où l'on peut vraisemblablement avoir deux réponses complètement contraires à ce sujet: tout, ou rien, dépendant de nos idéologies et des lieux d’où l'on regarde. Comme tout le monde le sait, la société de notre époque est implacablement marquée par une totalité des pratiques et des croyances intriquées, c’est-à-dire le système capitaliste. Selon l’analyse de Marx, la première caractéristique d’une modalité capitaliste, c’est une introduction d’une rupture dans des objets séparés désormais par sa «valeur d’usage» et sa «valeur d’échange», ce qui nous ramène à la séparation entre l’homme et son travail et, finalement, à sa propre aliénation. Et c’est dans cette perspective que l’on peut comprendre mieux le rôle significatif que joue la publicité dans notre société capitaliste. Tandis que le système capitaliste industriel du XVIIIe siècle qu’analyse Marx introduit dans le processus de la production une rupture entre les ouvriers et ses travaux, maintenant le capitalisme médiatique— avec son dispositif total qui consiste en le journal, le radio, la télé et finalement l’Internet— vient envahir complètement le processus de la consommation tout en y introduisant une autre rupture, séparant ainsi une nouvelle sphère purement spectaculaire qui est, cependant, radicalement sans aucun usage, à savoir celui de la publicité. 

         Concernant ce point, le lecteur peut demander: «Qu’importe qu’il y a des pubs partout, si je n’en regarde jamais sérieusement à la télé, ou bien si je ne tombe pas jamais dans son piège et en consomme?» Mais tout comme le système capitaliste ne consiste pas simplement en des pratiques réglées par la logique du marché, mais aussi en une certaine croyance théologique, utilitariste et hyper-optimiste (on pense dans ce cas au concept du « rêve américain » et l'observation de Walter Benjamin que le capitalisme est une seule religion «sans trêve et sans merci»), de la même manière le piège ultime de la publicité ne se situe pas aux expositions des marchandises extérieures de nous mais plutôt aux un culte et une culture des « exhibitions » intériorisées par des hommes. Le CV, par exemple, est un des meilleurs exemplaires de la publicité intérieure que fait l’homme à lui-même. Quiconque a fait l’expérience d’écrire un CV, il est évident qu’il doit arriver à un point où il ne peut que mentir un peu, où il éprouve à  contrecœur un besoin de se présenter mieux en se conformant au format prescrit. Ce qui est ironique là, c’est que les patrons à qui des CV sont destinés, eux aussi, savent aussi bien que les solliciteurs ne peuvent jamais coïncider avec les images crées par leurs CVs. Ainsi, le format de CV se transforme en un règle autonome, une performance dépouillée de aucun sens possible qui est, pourtant, nécessaire pour sa seule exhibition et sa présentation pure. Et en fait, ce «règle CV» ne se confine pas dans le monde d'emploi mais, aujourd’hui, on a déjà constaté sa ramification partout dans notre vie quotidienne: sur Facebook, où on doit «uploader» toutes les meilleures photos de ce que l’on fait et de nous-mêmes afin de séduire les gens; ou bien sur Couchsurfing, où on doit également se présenter (sinon se vendre) comme une marchandise charmante pour que quiconque puisse nous accueillir et nous recueillir. En somme, la sphère spectaculaire de la publicité comprend non seulement les pubs au sens littéral, mais tout ce qui existe en prenant comme sa raison d’être une pure valeur d’exposition et qui, surtout, exhibe toujours précisément ce qui lui manque. 

          Maintenant, on comprend enfin pourquoi la publicité peut servir en même temps à tout et à rien. Elle ne sert à rien parce que, si l’on a raison dans notre analyse susdite, la publicité est, par définition, ce qui ne possède absolument aucun usage en soi et qui, comme le CV, présente cependant toujours son propre néant comme un grand spectacle inexorable. Néanmoins, c’est exactement grâce au spectacle de la publicité— cette création ex nihilo— que le capitalisme de notre époque peut trouver son moteur au cours de se transformer en une «société du spectacle» totale. En ce sens, la sphère de la publicité sert à tout, puisque  le capitalisme ne survit pas sans le spectacle inutile. Et c’est pourquoi, en décidant une réponse à la question «À quoi sert la publicité?», nous choisissons aussi le sens de nos vies, car, finalement, le choix est entre la lucidité et le capitalisme, entre la résistance (quelles que soient les manières) et la soumission et entre l’homme et le mur.